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« Les Métamorphoses de la Terre. L’humanité et la nature. Une nouvelle histoire du monde » (The Earth Transformed. An Untold History), de Peter Frankopan, traduit de l’anglais par Patrick Hersant et Sylvie Kleiman-Lafon, Tallandier, 992 p., 31,90 €, numérique 23 €.
Les Métamorphoses de la Terre, de Peter Frankopan, est un livre d’une ambition folle. Le médiéviste, byzantiniste et professeur d’histoire globale à Oxford n’entend rien de moins que retracer la manière dont l’environnement a modelé, depuis leur apparition, les sociétés humaines et dont ces dernières l’ont transformé jusqu’à atteindre, aujourd’hui, un point de non-retour.
On retrouve dans cette fresque de près de mille pages ce qui avait fait le succès retentissant des Routes de la soie (Nevicata, 2017), où il déplaçait ce qu’il nommait « le cœur du monde » de la Méditerranée et de l’Europe vers l’Asie, entre la mer Noire et l’Himalaya. Ainsi, l’histoire climatique mondiale que Peter Frankopan met ici en œuvre n’oublie à aucun moment les régions appelées à souffrir le plus durement des conséquences d’une révolution industrielle née en Occident : l’Afrique, le Moyen-Orient, l’Asie ou l’Amérique latine.
Mais l’historien étend surtout son spectre chronologique, puisque le récit ne commence pas avec l’Antiquité, mais il y a 4,5 milliards d’années, quand notre planète se forme, appelant le lecteur à un décentrement radical : l’humanité ne représente, à cette échelle, qu’un battement de cils et sa réussite a, dès l’origine, été conditionnée par le cycle hasardeux et incontrôlable des catastrophes et des changements climatiques. En faisant feu de tout bois (sources archéologiques, écrites, études de biologie ou de climatologie), Peter Frankopan entend dès lors réarticuler données climatiques et histoire de l’humanité. Au passage, il invente une forme nouvelle de matérialisme historique, où le moteur de l’histoire n’est plus l’évolution des moyens de production, comme pour Marx et Engels, mais le changement climatique.
Le livre fourmille d’anecdotes et d’exemples concrets, comme l’invention décisive de l’agriculture qui, si elle n’était sans doute pas impensable avant l’holocène, intervint à la faveur d’une stabilisation météorologique advenue au début de cette ère, il y a dix mille ans. Les trois cents premières années d’expansion de l’Empire romain auraient, quant à elles, bénéficié de niveaux d’activité volcanique exceptionnellement bas, de peu d’événements météorologiques extrêmes et de schémas climatiques prévisibles.
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